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Le voyage interdit

(réalisé)
Octobre 2020, en plein Covid, un second confinement se dessine. 
Nous prendrons la route depuis Agay dans le sud de la France et nous mettrons le cap sur Zakopane en Pologne, pays d'origine de ma compagne, en espérant des jours meilleurs une fois là-bas. Mais la liberté a un prix, seule issue : la route, les forêts, l'inconnu... Nous enchaînerons les kilomètres à l'aide de deux vieux vélos, ils nous faudra faire face aux problèmes, seuls, autonomes, affrontant des conditions météorologiques compliquées, les forêts comme ange gardien de nos nuits dehors, puis parfois, une rencontre, une porte qui s'ouvre, la Providence. Durant cette aventure hors du commun, nous serons les spectateurs d'un monde paralysé, où la peur règne, où les restrictions durcissent de jour en jour, où faire des plans n'existe plus, où le gîte et la douche chaude, quand l'appel du confort arrive, ne seront plus qu'un lointain souvenir. Nous vivrons au jour le jour ne pouvant compter que sur nous-mêmes et nos modestes connaissances en survie. Nous apprendrons énormément, ferons de belles rencontres, vivrons des émotions très fortes et dépasserons nos limites. Nous parviendrons à atteindre notre but le 3 janvier 2021 après 65 jours de route à travers l'Europe, une aventure qui restera gravée dans nos mémoires.
vélo de route
Quand : 29/10/20
Durée : 65 jours
Distance globale : 1782km
Dénivelées : +11873m / -10980m
Alti min/max : 10m/1167m
Carnet publié par Chris et Ada le 25 avr.
modifié le 29 avr.
Mobilité douce
Réalisé en utilisant transports en commun (train, bus, bateau...)
C'est possible (ou réalisé) en train
Précisions : Une partie se fera en train, entre Théoule-sur-Mer et Vintimille, à la frontière italienne, afin d'éviter de justesse la fermeture du pays. Nous parcourrons également une cinquantaine de kilomètres en voiture en Hongrie, pour honorer la généreuse ...
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Vue d'ensemble

Le topo : Section 2 (mise à jour : 29 avr.)

Distance section : 192km
Dénivelées section : +2030m / -2213m
Section Alti min/max : 97m/946m

Description :

Nous quittons la Ligurie et les oliviers pour entrer dans le Piémont.

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Le compte-rendu : Section 2 (mise à jour : 29 avr.)

5 NOVEMBRE

Comme promis, Giovanni fait chauffer le moteur de la Jeep et nous voilà partis en direction d'Albenga, avec ma roue sous le bras. Jamais je n'aurais pensé revoir la mer si tôt ! Une fois au magasin, le gars m'annonce clairement que seul un ferronnier peut sauver ma roue et qu'il n'y en a pas dans le coin. Par chance, il me dégote une roue qui correspond aux dimensions. Adieu la roue vintage, place à la modernité, du moment que je peux rouler ! Il remonte ensuite ma vieille roue libre Maillard (pour les connaisseurs) sur la nouvelle roue moyennant quelques ajustements, et nous rentrons à la maison. Je galère un moment pour réajuster la roue et refaire tous les réglages, dérailleur et freins arrière, pas simple sur un vieux coucou ! Nous portons un toast ce soir autour d'un Ormeasco di Pornassio, un très bon vin rouge du pays. Nos hôtes nous offrent des sanguins fraîchement cueillis avec lesquels Ada nous prépare des spaghettis d'exception.



   

Très belle architecture dans la ville de Pieve di Teco.
Très belle architecture dans la ville de Pieve di Teco.
6 NOVEMBRE


À nous le Piémont ! Mais pour cela, il nous faut franchir le col de Nava et ses plus de 13 km d'ascension. Déjà une semaine depuis le départ et l'impression d'être sur la route depuis des mois. Tant de péripéties pour si peu de kilomètres. Nous vivons à fond et avançons doucement. Le vélo tourne impeccablement avec son nouveau look, toutes les vitesses s'enclenchent sans broncher et les freins mordent bien. Je suis content de moi et retiendrai la leçon. Quelle aventure ! Le souffle des poids lourds nous déporte, et nous serrons les dents à chaque passage. Nous arrivons en haut du col et profitons encore d'un grand soleil. Seulement, nous basculons de l'autre côté dans l'ombre, et les températures chutent drastiquement. Le temps se couvre, et nous filons maintenant le long d'une rivière ravagée par la dernière tempête. C'est un vrai cimetière, les arbres et branchages arrachés s'entremêlent au milieu de la rivière qui a retrouvé le calme. Les oliviers et le soleil nous manquent déjà.


En haut du col de Nava, nous basculons dans le Piémont de l'autre côté.
En haut du col de Nava, nous basculons dans le Piémont de l'autre côté.
Pour les amateurs de VTT. La traversée de la Ligure.
Pour les amateurs de VTT. La traversée de la Ligure.
Bivouac dans une ambiance lugubre.
Bivouac dans une ambiance lugubre.
7 NOVEMBRE

Mon duvet ne ferme plus ! Acheté pas cher avant de partir avec une température confort de 0 degré, c'est de la merde ! Il a fait frais cette nuit et impossible de remonter la fermeture éclair, j'ai passé une nuit pourrie à me tourner dans tous les sens pour essayer de m'enrouler et conserver de la chaleur. Bon, j'arrête de me plaindre, on a connu pire. Un bon café chaud, un peu d'exercices pour se réveiller et nous quittons cet endroit humide.
Le ciel se dégage et nous roulons bien ce matin, avalant facilement une cinquantaine de bornes. Les montagnes sont maintenant derrière nous et nous devrions les retrouver en Slovénie. C'est étrange de traverser des zones industrielles où tout est fermé, un vrai désert. Nous partageons la route principalement avec les poids lourds sur les grands axes et quelques voitures sur les petites routes, comme la SP12 que nous empruntons et où nous trouvons une jolie forêt aux couleurs d'automne.
Une réserve d'eau de 10 litres avec une anse nous permet de faire le plein quand on a la chance d'avoir un point d'eau à proximité du bivouac. Attachée à une branche, on a de quoi boire, cuisiner, faire la vaisselle et même un brin de toilette sans problème, plus un petit filtre à eau bien sûr pour éviter les problèmes de contamination.


Ada dans son élément.
Ada dans son élément.
Super spot pour le bivouac: joli, bien plat, discret et un point d'eau juste à côté.
Super spot pour le bivouac: joli, bien plat, discret et un point d'eau juste à côté.
Le rituel du soir: les impressions du jour au chaud dans le duvet.
Le rituel du soir: les impressions du jour au chaud dans le duvet.
8 NOVEMBRE


J'ai mis au point une astuce pour conserver un peu de chaleur cette nuit : je rentre dans mon sac à viande avec le duvet. En gros, je fais l'inverse, ce qui me compresse suffisamment pour éviter que le duvet qui ne ferme plus ne s'ouvre complètement pendant la nuit. C'est du système D, mais ça fait le job, enfin pour l'instant ! Heureusement, Ada n'a pas de problèmes avec le sien.
Nous gardons pour plus tard des premières couches chaudes militaires qu'un pote m'a offertes. Le but est de s'acclimater, de nous endurcir petit à petit et de nous préparer pour les températures hivernales en gardant quelques jokers pour les nuits compliquées.
Nous n'hésitons plus à faire le plein de provisions quand nous en avons l'occasion, peu importe le poids. Difficile de compter sur le prochain magasin, tout ferme ! Les galères et les soupes au lait chaud de la première semaine... c'est très bien, mais on peut faire mieux.
Classique porridge au petit-déjeuner, fruits secs et quelques barres dans la journée. On ne fait pas de repas le midi et on reste dans le rythme, mais dorénavant, nous mettrons un point d'honneur à préparer le repas du soir, sinon on ne fera pas de vieux os ! Ada est une spécialiste de la cuisine en général, mais surtout, elle maîtrise à la perfection la cuisine de bivouac. Avec quelques ingrédients et quelques épices, elle te sort un super repas dans toutes les situations.
Nous sommes bientôt à sec en gaz et le Decathlon d'Alba sur lequel on comptait est fermé. À ma grande surprise, je trouve quelques rustines et des chambres à air dans le supermarché juste à côté. Je vois ça comme un signe et en reprends quelques unes. Le type à la caisse me dit que le Decathlon sera ouvert demain, seulement deux jours par semaine depuis les nouvelles restrictions.
On bivouaque à quelques kilomètres dans un champ de noisetiers, c'est parfait. On plante les piquets entre deux rangées d'arbres et on fera un saut chez Decathlon demain matin.


Bivouac sous les noisetiers.
Bivouac sous les noisetiers.
9 NOVEMBRE


Je renifle une odeur de merde fraîche en sortant de la tente ce matin. Je trouve rapidement d'où viennent les effluves : de mon vélo, bien sûr ! En les poussant dans le champ jusqu'au lieu de bivouac, j'ai roulé dans une délicieuse merde fraîche qui est venue se loger sous les gardes-boue, la fourche avant, même les étriers de freins ont morflé ! J'enlève le plus gros avec des feuilles, le reste se chargera de nous porter bonheur.
C'est drôle, le McDo est ouvert et les gens font la queue, leur masque vissé sur le nez, en attendant leur Mc Morning. Triste société... En tout cas, on est bien content de leur gratter la Wifi et d'envoyer quelques nouvelles à nos familles.
Pas de gaz chez Decathlon, nous repartons bredouilles, hormis un thermos qui devrait bientôt nous être utile.
30 bornes accroché au guidon sur la bande d'arrêt d'urgence avec un défilé de poids lourds, et nous rentrons dans Asti où, par chance, une petite droguerie est ouverte. En chinant tous les recoins, je tombe sur le Graal. Deux cartouches de gaz poussiéreuses (clin d'œil à la merde fraîche !) Je les brandis comme un trophée en les montrant à Ada.
En route vers Alexandrie, nous retrouvons les petites routes régionales. Il est déjà tard, on n'aura pas roulé beaucoup et il faut dénicher le bivouac. En tout cas, la mission du jour est remplie.


Le Piémont est une très belle région.
Le Piémont est une très belle région.
Panneau solaire sur le dos tant qu'il y a du soleil.
Panneau solaire sur le dos tant qu'il y a du soleil.
L'humidité est devenue notre quotidien sur nos bivouacs italiens.
L'humidité est devenue notre quotidien sur nos bivouacs italiens.
Pas facile.
Pas facile.
10 NOVEMBRE


Il ne pleut pas, mais tout est trempé ce matin lorsque je pointe le nez dehors dans une brume épaisse. Les branchages s'égouttent sur la toile de tente recouverte de jolies feuilles orangées. On peut dire que la tente fait le job. À l'intérieur, RAS, nous sommes au sec et passons de bonnes nuits. Quelques canards viennent nous dire bonjour.
Nous plions le bivouac, la tente a plus l'air d'une serpillère! Elle n'a plus vraiment le temps de sécher en ce moment, peu de soleil ces derniers jours. On déballe mouillé et on remballe mouillé ! Quelques anciens sont sur leur 31 à la boulangerie du coin, chaussures bien cirées, cheveux gominés et surtout la paire de Ray-Ban, soleil ou non, la classe à l'italienne, j'adore ! Deux gros sandwichs au salami plus tard, avalés en observant la scène, et nous mettons le cap sur Alexandrie.
Ada est en forme et moi aussi. Nous prenons confiance sur nos montures, les corps se façonnent, les muscles durcissent. On ne regrette pas d'avoir pris la route, c'est ici qu'on se sent bien, qu'on apprend. Nous franchissons le plus important fleuve italien, le Pô, et avalons 60 kilomètres le long de ses rives.



Traversée de villages déserts.
Traversée de villages déserts.
Les bivouacs se ressemblent.
Les bivouacs se ressemblent.
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